Editorial

06.11.2013

RMS 11/2013

L’inutile travail de nuit

«Ceux qui donnent perdent, ceux qui reçoivent appauvrissent, et cela fait vivre les intermédiaires.» La citation est de Karl Kraus (Nestroy und die Nachwelt, in: Die Fackel, n° 349/350, Vienne, 13 mai 1912). Plus de cent ans après, cette phrase réapparaît dans le feuilleton des journaux allemands, par exemple le 17 octobre dernier dans die Zeit, au travers d’un article signé de Maximilian Probst et Kilian Trotier intitulé Le réseau étouffe l’idéalisme. Dans les grandes lignes, l’article conclut que les multinationales de la Silicon-Valley détournent les possibilités techniques d’Internet pour exploiter à leur compte la richesse des autres. En point de mire: des sites d’échanges qui rapportent aujourd’hui beaucoup d’argent à des entreprises, là où il n’y avait rien à gagner jusqu’ici. — Soit, mais alors? Les temps changent, pourquoi vouloir s’y opposer? Notre société de services est ainsi faite.

La citation de Kraus n’a pas de lien direct avec le sujet de notre numéro: «musique de nuit». Pourtant, on peut y voir un lien indirect. Elle stigmatise la perte de la mise en valeur du travail lui-même, un problème qui sévit depuis longtemps dans le monde entier, et qui touche de plus en plus le domaine musical en rendant naturelles la copie et la consommation gratuites de contenus artistiques, en offrant aux musiciens indépendants des conditions de travail de plus en plus difficiles, et en conduisant à la faillite d’institutions entières. D’innombrables nuits sans sommeil pour un peu de pain et de potage? — Et alors? Offrir fait toujours plaisir!

Il ne faut pas oublier toutefois que dans la situation triangulaire de la phrase de Kraus, celui qui reçoit est celui qui appauvrit parce que naïvement, en croyant faire de bonnes affaires, il ne rend pas honneur au travail de celui qui donne. Et est-ce que l’intermédiaire, au final, est bien celui qui rit le dernier?

Cordialement

Katrin Spelinova


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